La vieille église Notre Dame

 

Église édifiée au 12éme siècle, elle appartenait à un prieuré dépendant de l’abbaye bénédictine de Charenton du Cher. Elle est mentionnée pour la première fois dans une bulle du pape Eugène III adressée à l'abbesse de Charenton. En 1410, Isabeau de la Pointe en est la prieure. En 1503, le prieuré fut supprimé par le Cardinal Georges d’Amboise, la paroisse annexée demeura jusqu'à la Révolution Française où elle fut vendue comme bien national .

L’édifice est séparé en deux parties :
-       La nef est transformée en bâtiment agricole et plus récemment en habitation
-       Le chœur et l’abside sont une chapelle privée dédiée à Notre Dame où reposent les derniers propriétaires  .

 Depuis 1973, l’église Notre Dame de Vernais est propriété de la commune, suite au legs de Monsieur Faure Dupont .

 Le mur d’enceinte et l’ancienne église ont été classés par arrêté du 10 mai 1995 .

« ‘Joyau’ dans un écrin de verdure »

Lorsqu’au détour d’une promenade nous découvrons l’église, il nous faut deviner la nef, le mur d’enceinte n’est plus qu’une ruine qui s ‘effondre au gré du temps, seul le chœur de l’église demeure comme tel. D’époque romane, Notre-Dame de Vernais abrite une peinture murale du 13ème siècle représentant le couronnement de la vierge .

En entrant dans l’enceinte du bâtiment, la vétusté nous interpelle, en regardant bien nous pouvons voir l’église telle qu’elle fut à ses heures de gloire, sur la gauche, la nef soutenue par six contreforts, nous apercevons encore les petites fenêtres plein cintre murées, elle ne semble pas avoir eu de voûte .
     Dans l’église, l’humidité ravage le bâtiment et cependant un lieu de paix et de recueil s’ouvre à nous . Des visiteurs nous ont souvent dit ‘Quel chef d’œuvre, mais en péril

La porte donne sur la travée de l’ancien clocher, probablement une simple charpente qui reposait sur une coupole sur trompes. Selon les recherches que nous faisons, il y avait trois cloches avant la révolution qui animaient le clocher. En effet le 20 germinal an 2, l’agent national Jean Baptiste Bonnelat réquisitionnait les cordes qui servaient à sonner les trois cloches  pour les mener au chef lieu de l’administration de district afin qu’elles soient mises à disposition du ministre de la marine et de faire conduire avec les cordes, la seule cloche restant dans le clocher pour qu’elle soit transformée en ‘bouche à canon’.* Il se peut que les deux autres cloches aient été déplacées vers des bâtiments communaux.

   A notre droite, nous découvrons le chœur, il consiste en une travée voûtée en berceau légèrement brisée donnant sur une abside en cul de four .  Les deux arcs retombent sur quatre colonnes engagées dont les chapiteaux sont ornés surtout de feuilles d’acanthes .

Les murs du chœur sont décorés d’arcatures plein cintre supportées par des doubles colonnettes aux chapiteaux décorés de feuillages très plissés .

L’abside semi-circulaire est éclairée par trois fenêtres encadrées par un gros boudin, la même moulure court au dessus des baies et entoure le sanctuaire, les vitraux sont remplacés par du simple verre .

 L’un des intérêts de l’église réside en une fresque qui occupe le fond de l’abside, elle représente le couronnement de la vierge, en 1995 elle fut partiellement restaurée. Sur un long siège sont assis le Christ et Marie à sa droite, le Christ porte une barbe, il est vêtu d’un manteau et d’une robe, la Vierge est habillée de façon similaire, les manteaux sont rouges doublés de vert. Au dessous de chaque coté se trouvent deux anges, le premier à genoux tient un encensoir, le second debout porte un chandelier, plus bas, nous trouvons six personnages probablement des anges thuriféraires . Le fond du médaillon est bleu .

 Les arcs doubleaux et la voûte du chœur sont également peints, on y distingue des motifs décoratifs recouvert d’un badigeon plus récent . Les mousses et algues qui sévissent sur les murs recouvrent petit à petit tous ces témoignages du passé. Les murs de l’abside sont épaulés par quatre contreforts .

 En faisant le tour du bâtiment à l’extérieur, nous pouvons découvrir sur une des façades, derrière un bâtiment qui devait être un poulailler, ce qui fût probablement une entrée surmontée d’un boudin. Nous retrouvons le même dans le sanctuaire ainsi qu’au dessus des baies . 

Plus loin sur la façade Ouest se trouve ce qui fût certainement le portail, actuellement complètement muré; remarquons sur la clé de voûte la date 1778 et plus bas sur la droite un soleil sculpté dans la pierre .

De nos jours ce symbole figure sur les bornes indiquant le chemin de St Jacques de Compostelle, Vernais se trouvant sur ce chemin de nombreux pèlerins traversent notre village chaque année.
    A moins qu'il ne s'agisse de la signature d'un artisan ayant oeuvré pour l'église .

 Nous  pouvons aussi découvrir au niveau de la travée du clocher des motifs décoratifs sur la façade nord, il se peut qu’un transept ait existé ou bien une chapelle Sainte-Elisabeth (comme mentionné dans le procès verbal de la visite épiscopale de 1732) et qu’il fût détruit au cours du temps. Lors de l’inventaire de l’église le 20 pluviose an 2,  il est fait état d’une sacristie dont plus rien ne subsiste aujourd’hui. Nous retrouvons aussi trace de la flèche de cette vieille église le 9 thermidor an 2 (27/07/1794) lorsque le maire de Vernay (orthographe de l'époque) décida de raser le clocher au niveau de la couverture de l’église pour que la cloche soit descendue, la toiture fut reprise .*

 Pour voir l’ancienne église Notre Dame de Vernais, il faut savoir gommer toutes les modifications apportées après sa vente. Si le visiteur réussit ce difficile exercice il lui suffit, alors, de lire ces quelques lignes pour imaginer l’église de Vernais, au détour du temps et des gens revivre …

 « …Il y avait aux Chaumes, village de la même paroisse de Vernais, un vieux laboureur, Michel Chaumet qui, de sa première femme Anne Gavenon, avait eu un fils et trois filles ; sa seconde épouse, Françoise Auclerc, veuve de Jean Métrat, les avait élevés en même temps que son propre fils, Gabriel . L’une de ses filles Chaumet avait été mariée dans la très sérieuse et cossue famille Bougras, mais Pierre Bougras, laboureur à la Faye et Marie Chaumet étaient morts si jeunes que leurs trois enfants avaient grandi chez les grands parents maternels aux Chaumes où, comme par hasard, le fils de François Auclerc avait épousé une fille de Michel Chaumet. Gabriel Métrat fut un bon oncle pour les enfants Bougras, et l’enfance d’Anne et de Jeanne Bougras avait ainsi été heureuse lorsque leur grand-père les maria dans la famille Protat .
    La cérémonie eut lieu le 12 février 1732, dans la belle abside de l’église « Notre–Dame de Vernais » où reçurent la bénédiction nuptiale Laurent Protat fils des défunts Jean Protat et de Marie Perrinet, et Anne Bougras, fille des défunts Pierre Bougras et Marie Chaumet, d’une part, ainsi que Jean Protrat et Jeanne Bougras, frère et sœur des précédents d’autre part . Le grand père Chaumet est là, avec sa femme, Françoise Auclerc, avec l’oncle Gabriel Métrat, tandis que trois neveux et nièces Perrinet entourent leur tante Marie qui se serait sentie bien seule auprès de cette compacte famille Bougras .

Dans les belles églises Romanes comme dans les autres, on ne célèbre pas que des jours heureux …

Pêle-mêle, dans les dix années qui suivront, les cloches de Notre-Dame de Vernais sonneront les baptêmes des cinq enfants de Laurent Protat et d’Anne Bougras, mais le glas tintera aussi lorsqu’on amènera devant l’autel de Saint-Fiacre, les corps de Michel Chaumet, puis de Françoise Auclerc, puis de Gabriel Metrat tous « après avoir reçu les trois sacrements » .

Alors les enfants de Laurent Protat grandirent. L’aînée, Anne, fidèle à ses origines, retournera au pays de ses pères, mais pourquoi est-ce en l’église de Bessais, le 10 février 1756 ; qu’elle épouse un laboureur de Thaumiers, Antoine Fournier ? La seconde Anne atteint 23 ans et pourquoi tarder, le fermier de Rhimbé, venant de perdre sa femme, Catherine Renom, un laboureur peut être tenté d’établir sa fille chez un meunier . Si on ne connaissait guère les Tixier, on n’était pas sans savoir qui étaient les Renom, au point que d’un moulin à l’autre, d’Ainay à Bardais, on se perdait dans leurs noms de baptême. Le 8 février 1763, Jean Tixier, 27 ans, assisté de Claude Vallentin , son beau-frère et de Jean Renom, son parrain, épouse Anne Protat, fille de Laurent Protat et d’Anne Bougras, elle a pour témoin sa grande-tante et marraine, Anne Chaumet, ainsi que Laurent Naveaux, son cousin germain . Les cloches de Vernais sonnent à toute volée tandis que le cortège sort joyeux de l’église Notre-Dame, laissant les grands-parents y dormir leur dernier sommeil ; ce ne seront pas elles qui sonneront les heurs et malheurs du jeune couple …dès le lendemain, Anne Protat suivra son mari sur la paroisse de Bannegon …. »

Extrait de Geneviève Millot « Chronique d’entre Berry et forêt de Tronçais »

    A Buhot de Kersers, dans son livre, paru en 1885, ‘l’histoire et statistique monumentale du département du cher’, volume 3, concluait ses recherches sur la vieille église Notre Dame de Vernais ainsi :

« … Malheureusement une église nouvelle vient d’être construite et tout fait craindre que ce charmant débris n’ait bientôt disparu. »

Propos plus que d’actualité, en effet s’il nous faut ouvrir les yeux pour nous projeter dans le passé de Notre Dame de Vernais, surtout, ne les refermons pas sur son devenir. Puisse le temps ne plus abîmer jusqu'à faire disparaître totalement cette église qui a connu tant d’événements historiques, elle est d’ailleurs notre histoire, oeuvrons pour que les générations à venir puissent encore admirer et profiter de ce bien .

L’association « Sauvegardons l’ancienne église notre Dame de Vernais » crée en décembre 2003 porte intérêt à l’église, elle réunit quelques passionnés, désireux de sauvegarder ce  patrimoine et de le faire découvrir  .

Visite possible en contactant la mairie au  02-48-60-74-79.

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    Ces recherches ont été effectuées par Dominique Barbier et Sigrid Simonin

                        *Diagnostic  -Etude d'évaluation par Richard Duplat. Septembre 2020

                        *Aux Archives Départementales de Bourges, où ont été consulté les oeuvres suivantes :

-                       J. de Sacy  « Dictionnaire des églises de France »
            -                       A Buhot de Kersers  « Histoire et statistique monumentale du département du Cher Volume 3 »
  
         -                        R. Gauchery et Maurice de Laugardière « l’ancienne église de Vernais »
            -                       A. Frémont  « Département du cher »
            -                       Geneviève Millot « Chronique d’entre Berry et forêt de Tronçais »

*Auprès de documentation  appartenant à des personnes privées, nous remercions Monsieur le Maire de Vernais, Monsieur Adolph  pour nous permettre d'accéder aux archives municipales .  

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